Si je n’avais qu’une seule vitamine à vous suggérer, ce serait la vitamine D. En mai 2007, j’ai eu l’honneur de rencontrer le docteur Michael Holick, biochimiste et endocrinologiste à Harvard, auteur de plus de 400 publications scientifiques portant sur la vitamine D. Ses recherches m’ont ébahi. Il y a 30 ans, il aurait été très ennuyeux de parler de vitamine D puisque sa principale indication était jusqu’alors le traitement du rachitisme chez l’enfant, maladie que je n’ai rencontrée qu’à quelques occasions dans ma vie. Durant mes études médicales, on mettait l’accent sur l’intoxication aux vitamines et principalement à la vitamine D. Pourtant, celles-ci ne survenaient que chez des gens qui ne mangeaient que du foie d’ours polaire ! Comme la plupart des médecins, j’ai prescrit la vitamine D au faible dosage recommandé, craignant un surdosage. Mais à bien y réfléchir, qui a déjà vu une intoxication à la vitamine D ? Je n’en ai vu qu’à une seule occasion chez une femme âgée de 80 ans qui, par mégarde, avait pris des centaines de gouttes de vitamine D quotidiennement, croyant qu’il s’agissait de gouttes pour se relaxer. Cette erreur d’inadvertance ne lui avait engendré que des diarrhées. Pourtant, elle avait pris plus de 100 000 UI (unités) pendant quelques jours!

Mais, aujourd’hui, voilà que la vitamine D devient un enjeu majeur pour la santé dans le monde entier. C’est la vitamine de l’heure sur la planète. On réalise soudainement que le monde est carencé en vitamine soleil ! Selon certains experts, on peut parler de pandémie. On estime que 30 à 80 % de la population américaine et canadienne souffre de carence en vitamine D. Statistique Canada, en 2010, annonçait que 3 000 000 de personnes affichaient un taux sanguin déficient en vitamine D par rapport à la norme optimale. En 2012, dans un article du Figaro, l’Académie de médecine statuait qu’environ 50 à 70% de la population française était carencée en vitamine D, expliquait le professeur Bernard Salle lors de sa présentation intitulée Statut vitaminique, rôle extra osseux et besoins en vitamine D : « La prise de vitamine D devrait être systématique chez toutes les personnes de 50 ans et même pour les enfants, le tout sans risque d’hypercalcémie. » Toujours selon ce spécialiste, l’Institut de veille sanitaire constatait que les adultes originaires d’Afrique et du Moyen-Orient vivant en France ont un risque plus élevé de développer un déficit sévère en vitamine D en raison, notamment, de la pigmentation de la peau foncée et aussi d’un style vestimentaire ne permettant pas une exposition suffisante aux rayons solaires. Même en Afrique et en Inde, on constate des carences tout aussi marquées qu’en Amérique du Nord.

 

Une protection contre plusieurs maladies grâce à la vitamine D

La littérature scientifique sur les effets positifs de la vitamine D sur la santé foisonne. Il y a plus de 100 000 études de recherche sur la vitamine D! Depuis une dizaine d’années, plusieurs grands experts nous disent à quel point elle est la vitamine par excellence.

De plus en plus d’études semblent indiquer un lien entre la carence en vitamine D et certains types de démence. En 2014, dans la revue Connections qui regroupe les plus récentes recherches dans le domaine médical, Joel Dahms mentionnait que nous avions sous-estimé les résultats démontrant une relation entre le faible taux de vitamine D et les troubles cognitifs, dont la maladie d’Alzheimer. Dans la revue Neurologie du mois d’août 2014, les scientifiques ont présenté les résultats d’une étude menée sur près de 2 000 femmes. Les patientes qui étaient modérément carencées en vitamine D avaient 51 % plus de chances de développer des démences de toutes sortes. Celles qui avaient une carence sévère voyaient leur risque augmenter de 122 % par rapport à celles qui avaient un taux normal de vitamine D. Une autre étude d’envergure dans le Journal of Alzheimer’s Disease démontra les mêmes résultats. Les auteurs suggèrent que les bas dosages de vitamine D affectent la cognition et la mémoire par un phénomène neurodégénératif et vasculo-dégénératif. En effet, il y a plusieurs récepteurs de vitamine D au niveau cérébral. Parmi ceux-ci, on trouve l’hippocampe, qui est le siège de la mémoire. De plus, le manque de sommeil, tel que rencontré dans nos sociétés modernes, pourrait être relié à de faibles taux de vitamine D.

Par ailleurs, les statistiques ont démontré une augmentation des incidences de cancer du sein, de la prostate et du côlon dans les régions situées aux latitudes supérieures, régions où la vitamine D solaire est peu disponible. Les enfants qui prennent un supplément de vitamine D ont démontré une incidence à la baisse de 30 % pour le diabète de type 1. Chez les adultes prenant une quantité suffisante de vitamine D, plusieurs autres maladies se sont révélées à la baisse : la dépression saisonnière, la maladie d’Alzheimer, le cancer, la dégénérescence maculaire, la douleur musculaire, la sclérose en plaques, l’ostéopénie (baisse de calcium dans l’os), l’hypertension, le diabète, les maladies cardiaques, les allergies, l’asthme et l’autisme. Cette baisse est variable selon les maladies, mais significative. Voilà un élément préventif de tout premier ordre et une solution santé peu coûteuse.

On ne peut conclure à une panacée mais la documentation scientifique tend à qualifier aujourd’hui cette vitamine comme « remarquable » et considère que tous les efforts devraient être déployés pour corriger la carence en vitamine D. Une étude récente a ainsi démontré une baisse de 90 % des infections des voies respiratoires supérieures avec une dose quotidienne de 2 000 UI pendant des mois. Voilà une bonne nouvelle pour se prémunir contre la grippe qui frappera de nouveau l’automne prochain. Des doses de 3 000 UI en période de maladie virale ont démontré un avantage marqué au niveau de notre système immunitaire. Advenant un début de grippe ou tout autre virémie (présence de virus dans le sang), j’ai observé qu’une dose massive de 40 000 UI par jour pendant 3 jours fait régresser les symptômes.

En 2007, une équipe de recherche de l’université McGill a mesuré les niveaux de vitamine D dans le sang de 2 100 femmes âgées de 18 à 79 ans. Les femmes qui avaient des niveaux plus élevés en vitamine D avaient les télomères les plus longs. Les télomères sont les sections terminales de l’ADN. Comme ils raccourcissent avec l’âge, de plus longs télomères sont considérés comme un signe de jeunesse biologique. On peut donc penser qu’un taux optimisé de vitamine D pourrait aussi avoir un effet antivieillissement sur le corps.

Bref, cette vitamine soleil n’a pas fini de nous surprendre et d’autres bienfaits restent encore à découvrir.

 

La vitamine D, l’hormone soleil

La vitamine D est beaucoup plus qu’une simple vitamine. Elle agit comme une hormone (stérol) à différents niveaux et permet de contrôler les taux de calcium et de phosphore, le métabolisme des os et les fonctions neuromusculaires. La vitamine D est reconnue par presque tous les tissus humains et elle joue donc un rôle plus important que celui de simple traitement de l’hypocalcémie osseuse (baisse de calcium).

Notre principale source de vitamine D est le soleil. Le docteur Holick, endocrinologiste et chef de département d’une grande université américaine, et que j’ai rencontré, signalait en 2007, qu’une simple exposition au soleil du zénith pendant 30 minutes, sans crème solaire, produisait une augmentation de vitamine D entre 15 000 et 20 000 unités. Une exposition de 12 minutes au soleil avec seulement 50 % de la surface du corps exposé donne environ 3 000 UI. Quelle générosité, quel don de la nature pour une simple et seule exposition ! Le soleil est l’élément le plus important pour la vie ici sur terre et celui-ci nous fournit 95 % de nos réserves en vitamine D et probablement beaucoup d’autres éléments par son rayonnement sur le corps.

Le risque de cancer de la peau ne fait pas le poids par rapport à tous les bienfaits que nous procure le soleil. Je suggère de n’utiliser une crème solaire que 20 minutes après une exposition au soleil. Voilà une thérapeutique simple, utile et parmi les moins coûteuses. Les personnes obèses et les personnes à la peau foncée auront besoin d’une plus grande exposition solaire, l’embonpoint mobilisant la vitamine D et une peau foncée faisant écran au soleil. Évidemment, une exposition prolongée, même avec une crème solaire, est à déconseiller. Une surexposition devient une intoxication.

Il y a très peu de vitamine D dans notre alimentation : on la trouve en petite quantité dans les huiles de poisson (200 à 500 UI), certains champignons, et dans les aliments auxquels elle a été ajoutée, tels que le lait et le jus d’orange (120 UI).

La déficience en lumière solaire est un mal planétaire. La vitamine D est la seule vitamine connue à être synthétisée par le soleil et ce dernier est la principale source de vitamine D que le corps puisse recevoir. Nous sommes sédentaires et nous vivons beaucoup à l’intérieur en raison du froid, si bien que notre exposition au soleil devient minimale. Par temps chaud, nous sommes «conditionnés intérieurement» par l’air climatisé qui envahit nos maisons, nos voitures, nos commerces. Les jeunes, trop souvent sédentaires, restent enfermés pendant des heures devant la télévision ou l’ordinateur.

L’utilisation de crèmes solaires en continu ne fait qu’ajouter à cette pauvre conversion de la vitamine D par les mélanocytes sous l’effet des rayons UVB. Une crème écran solaire à indice de protection 8 diminue de 92 % la synthèse de la vitamine D et une crème à indice de protection 15 la diminue de près de 99 %! De septembre à avril, l’inclinaison solaire étant plus oblique, notre corps ne permet pas une synthèse suffisante de la vitamine D et même en été, avant 10 heures le matin ou après 15 heures l’après-midi, une quantité moindre de vitamine D est synthétisée par notre peau en raison de l’inclinaison solaire. Cependant, les effets brûlants du soleil sont moins nocifs à ces heures. Il ne faut pas négliger le fait que la pollution et les nuages bloquent en partie les rayons ultra-violets bienfaisants.

La déficience en vitamine D est donc un problème extrêmement fréquent, aux conséquences sérieuses en matière de santé, que vous viviez en Floride, en France ou dans le nord du Québec. Quatre-vingt-dix-huit pour cent des personnes vivant dans un établissement de santé de longue durée sont carencées en vitamine D. Sortir l’été est important et même sous une ombrelle, la synthèse de la vitamine D est malgré tout  opérante (même si cela est faible). Il ne faut pas oublier que le soleil était le seul médicament avant les antibiotiques pour traiter la tuberculose et le rachitisme.

Comme notre alimentation produit peu de quantités de vitamine D et que les sources de soleil sont souvent absentes dans nos régions, je recommande à mes patients de prendre 2 000 UI de vitamine D par jour l’été, et 3 000 UI pendant les saisons froides. La vitamine D est une vitamine liposoluble et donc il est facile d’en faire une provision, une seule dose de 14 000 UI à 20 000 par semaine pourrait faire autant de bienfaits en général.

Cependant, quelques recherches assombrissent le tableau en soulevant la possibilité qu’un surplus de vitamine D, menant à un surplus de calcium absorbé, augmenterait le risque de calcifications vasculaires. On retrouve fréquemment du calcium avec du cholestérol dans les plaques athéromateuses qui bloquent les vaisseaux sanguins. Il y aurait donc une théorie voulant que trop de calcium sanguin puisse calcifier les artères. Mais que se passe-t-il lorsque le calcium est absorbé et qu’il se retrouve dans le sang ? Normalement, une vitamine bienfaisante qu’on appelle la vitamine K2, la ménaquinone (qui n’est pas la vitamine K1 qui intervient davantage dans la coagulation sanguine), prend le calcium sanguin et l’apporte au réfrigérateur minéral, le squelette, qui le stocke. En effet, l’ossature est l’endroit où les minéraux se déposent en attendant d’être sollicités par le corps en général. On a découvert depuis 2004 que cette vitamine K2 est impliquée avantageusement dans les métabolismes cardiovasculaires et osseux, dans la croissance et dans la réduction des états inflammatoires. La ménaquinone est indispensable à la santé cardiovasculaire, osseuse et dentaire. La vitamine K2 devrait être ajoutée à tout supplément de vitamine D car elle contribue adéquatement au travail de calcification des os et de plus, selon certaines études, elle jouerait un rôle préventif pour les maladies cardiaques, les états inflammatoires et même les cancers. Certaines compagnies qui mettent en marché la vitamine D ajoutent d’emblée la vitamine K2 dans leurs compositions.

Extrait du livre La santé Repensée, Les Éditions de l’Homme.